mercredi 6 novembre 2019

Félines #PLIB2020


Le Rouergue
 💛💙💛💙💛
Félines
Stéphane Servant
Le Rouergue
Epik
août 2019
384 p. 
Fantastique
#ISBN:9782812618291 

Pré-sélectionné du #PLIB2020 et coup de coeur 💛💙💛💙


Le Plib
" Réfléchir, c'est commencer à désobéir.
Lire, c'est se préparer à livrer bataille."  

Le texte d'éditeur

 Personne ne sait exactement comment ça a commencé. Ni où ni quand d'ailleurs. Louise pas plus que les autres. Ce qui est sûr, c'est quand les premiers cas sont apparus, personne n'était prêt et ça a été la panique. Des adolescentes qui changeaient d'un coup. Des filles dont la peau se recouvrait de... dont les sens étaient plus... et les capacités... Inimaginable... Cela n'a pas plu à tout le monde. Oh non ! C'est alors qu'elles ont dû se révolter, être des Félines fières et ne rien lâcher !

" Depuis que le monde est monde, il a toujours la même tête et elle n'est pas très jolie. D'autres que moi diraient même qu'il a franchement une sale gueule."

La petite histoire

Nous écoutons le récit de Louise, vivant dans la clandestinité,  qui va relater quelques mois de sa vie mais aussi celles d'autres adolescentes qui ont connu dans leur chair la Grande Mutation. Un changement si brutal qu'il va provoquer la haine, la peur, la persécution et diviser la population. Louise va raconter comment elle va apprivoiser son corps, l'accepter et affronter le regard des autres. 

" Comme si la nuit était suspendue. Et la lame de la lune, là-haut dans le ciel, étincelait comme une griffe. "

Ce que je retiens de cette lecture...


Le contexte de lecture


Une lecture commune dans le cadre du Tournoi des élites et de l'épreuve des audacieux organisé par le staff du PLIB. J'ai donc fait cette lecture auprès des Guérisseurs.


J'ai adoré retrouver la plume de Stéphane Servant que j'avais savouré, il y a deux ans avec Sirius, une autre écriture bouleversante. 


Un petit mot sur la couverture en bleu et jaune de Patrick Connan, dont je conseille la  découverte de son site où l'on retrouve d'autres magnifiques couvertures de Rouergue éditions ou des pastiches d'affiches de film très réussis.

" La ville ressemblait à un chaudron où bouillonnaient l'ennui et les ragots. "

Je m'excuse pour l'effet brouillon de cette chronique : j'ai jeté mon ressenti au fur et à mesure. 

L'atmosphère du livre

Nous sommes d'emblée plongés dans le récit avec le "je" de Louise qui nous fait vivre toutes ses émotions, ses réflexions, son évolution, sa métamorphose physique mais surtout mentale. De l'adolescente à la femme, du doute à la détermination. 
La tension monte crescendo, prend son temps et l'atmosphère délétère s'étend progressivement mais sûrement. 
Pas de chapitres, pas de pause, pas de temps mort, on avance inexorablement avec Louise ballotés par les événements, pas de répit. 

Je ne cacherai pas que j'adore la plume de l'auteur : il écrit fabuleusement bien et ici il a une façon d'aborder la féminité qui me touche profondément et je suis émue de voir ce sujet traité avec tant de justesse par un homme. Il semble bien cerner les problèmes qui préoccupent les adolescentes d'aujourd'hui et de toujours aussi. L'auteur écrit pour et sur les femmes avec un ton juste et une connaissance sensible.


"Nous étions douze. Douze adolescentes, douze corps trop maigres, trop épais, trop tordus, douze corps imparfaits que nous tentions de dompter comme on l'aurait fait avec des chevaux sauvages. Nos chevaux étaient rebelles, mauvais et têtus.Nous mordions la poussière en essayant de les domestiquer. tout partait dans tous les sens, rien ne nous obéissait. Nos corps nous malmenaient, ils nous épuisaient." 

C'est une quête identitaire essentielle, vitale à laquelle nous assistons. Par le biais du fantastique, il dénonce les travers de notre société urbaine détachée de la nature, obnubilée par la performance et le paraître. 

Les personnages

Louise ne se plaint jamais et pourtant elle n'est pas toute blanche, elle a su être superficielle, lâche mais elle ne renonce jamais. Cette force est née des épreuves de la vie, la perte de sa mère, sa culpabilité, ses blessures physiques...

" Voilà le genre de fille que j'étais. Une enfant qui jouait à la femme fatale. Une Alice grimée en Reine de coeur sans pitié. Une Narcisse troublée par son reflet. Une adolescente, ni pire ni meilleure que les autres, je crois."

 Tom, l'ami, l'amant
Il est sensible, doux, à l'écoute et plus complexe que son allure ne le suggère. Il sait qui il aime et pourquoi. 

" Avec lui, j'avais compris que les gens ne sont pas que ce qu'ils montrent. Chacun possède un monde intérieur. Celui de Tom était étrange, décalé, mais aussi extrêmement créatif et sensible. Presque féminin, auraient pu dire certains."

le père de Louise et Satie, le petit frère 

 La famille est très soudée. C'est un pilier qui donne de la force et de l'équilibre à l'héroïne. Le père se révèle dans l'adversité et Satie réagit avec le coeur sans préjugés et a-priori. L'enfance qui ne juge pas, ignore les différences. 


Les filles

L'auteur a su cerner les problèmes de jeunes adolescentes perdues dans leurs corps et bombardées par les clichés ( dans les deux sens du termes) que notre société nous renvoient.

Fatia, Morgane, Sara, La Rouquine, la Blanche, Alexia, Camille et j'en oublie sans doute que Louise n'oublie pas.  

" J'aimerais que tu fasses tes propres choix. Pas ceux qu'on te dicte. "

 L'auteur met en avant le particulier, le singulier , l'unique par opposition à l'uniformisation, au standard, à l'anonyme revendiqué par les sectaires. Il prône un "je" conscient  qui s'unit à l'autre pour faire un "nous" riche, diversifié, complémentaire, complexe.

" Pour l'administration, le foulard comme le short étaient sacrilèges."

" Nos corps faisaient débat. 
Encore une fois. "

" Pour lui, nous incarnions la dégénérescence, nous étions la première tache sur le corps moribond de l'humanité, les signes de la catastrophe imminente, l'annonce de l'Apocalypse. "

 Je  remercie l'auteur pour son écriture poétique et coup de poing, je le remercie d'éveiller les consciences, d'en appeler à la vigilance, de responsabiliser son lecteur face à la différence, au déni des réalités.


" ... ce que l'homme ne comprend pas, souvent il le détruit. "

 Roar !!! C'est un coup de coeur pour moi ! Une écriture qui est poésie et poignard à la fois.  Un très bon roman adolescent à mettre d'urgence entre toutes les mains.

" Vous savez, c'est ce qu'on demande souvent aux victimes de viol : est-ce que vous avez résisté ? Vraiment résisté ? Et c'est insupportable d'entendre ça. Fred a profité du fait que j'étais jeune, frêle et ivre. Il a attendu que je sois la plus vulnérable possible pour s'en prendre à moi. Il n'y a qu'un seul coupable et c'est lui. On ne se fait pas violer. On est violée. Le viol, c'est l'autre qui le fait. C'est l'autre qui impose sa violence. Une violence extrême et aveugle qui fait de vous un objet que l'autre veut soumettre et détruire. "  

 " C'est à ça que servent les livres. A ouvrir les yeux des hommes, et, avec un peu de chance, leur coeur."

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Et vous, que pensez-vous de ce livre ?

La Jeune institutrice et le grand serpent

 La Jeune institutrice et le grand serpent Irène Vasco (autrice) Juan Palomino (illustrateur) Obriart ISBN : 9791095135494        Une lectur...