mardi 12 mai 2020

#PLIB2020 Le Garçon & la ville qui ne souriait plus


Lynks/ Pocket
❁❁🗡❁❁
Le Garçon & la ville qui ne souriait plus
David Bry
Lynks
janvier 2019 
352 p.
#ISBN9791097434229 

La petite histoire

 Romain fuit chaque nuit sa demeure bourgeoise et confortable, pour rejoindre la Cour des Miracles où vivent les anormaux – fous, difformes, obèses, et autres parias parqués là par les Lois de l’Église. Le soir de ses quinze ans, il découvre qu’un terrible complot vise les habitants de la Cour.
Des coupe-gorges de Mouffetard aux ruines de Notre-Dame, il devra compter sur son ami Ambroise, sur Joséphine, Lion et Akou, pour lever le voile sur la conjuration et échapper aux terribles Lames Noires, à la solde de l’archevêque de Paris.
Dans un monde assombri par la peur et l’intolérance, le salut peut-il venir de quelques adolescents en quête d’amour et de liberté ?
 

Le contexte de lecture

Lecture dans le cadre du #bingoduplib avec découverte d'un roman de la sélection du #plib2020. Cela fait un moment que je veux découvrir la plume de David Bry et son autre roman Que passe l'hiver me tente beaucoup.

Ce que je retiens de cette lecture...  

L'univers créé

David Bry nous propose de plonger dans le Second Empire mais avec un nouvel Empereur Nicéphore IIIème et une Police de la Norme sous l'égide de l'Eglise qui placarde des interdits et obligations dans toute la ville de Paris en cette année trouble de 1858. 
C'est une sorte d'uchronie qui permet de plonger dans une époque où les inégalités sociales sont criantes dans un Paris de complots et d'illusions. 
Nous suivons Romain, jeune garçon de 15 ans, bourgeois qui, tel un papillon de nuit est attiré vers les lumières et la musique de l'île où se trouve la Cour des Miracles, une foule bigarrée d'estropiés, de marginaux, d'anormaux relégués là par la société.  
Une ambiance de fête semble animer les lieux en totale opposition avec la vie monotone rythmée au métronome dans les quartiers de la haute société parisienne, guindée et frileuse. 

Les thèmes abordés

" je suis convaincu que la différence est justement le fondement de la société. Elle nous enrichit, nous ouvre, des horizons sans limites. Elle nous permet d'envisager plusieurs chemins, de les jauger et d'ensuite prendre le meilleur. Sans différence, la société stagne, n'évolue plus. C'est la mort assurée."

Le thème fil rouge de ce récit est la différence, refoulée, assumée, rejetée, recherchée. Elle s'exprime pleinement dans cette Cour des Miracles sur un îlot de fortune alors qu'elle est volontairement gommée ailleurs dans la capitale. 
Comme le demande Gaspard de Mirieu : 

" - Aimeriez-vous n'être entourés que de personnes complètement identiques à vous ? demande-t-il.
(...)
- Ce serait terrifiant, acquiesce le prince. Il n'y aurait plus d'inconnu. Plus de surprise. Plus d'incertitudes. Plus rien pour nous déranger, nous changer. Nous n'aurions plus besoin de défendre nos avis : nous aurions tous les mêmes. Nous n'aurions même plus besoin d'avoir des avis, d'ailleurs ! Ce serait la fin de ce qui rend chacun de nous unique... et donc absolument indispensables aux autres. "


La composition du récit
 Le récit est entrecoupé de décrets, lettres, extraits d'essai qui apportent judicieusement un éclairage sur les arcanes du pouvoir en 1858, sur le ressenti de certains membres de la famille de Romain notamment.

Les personnages

Nous suivons Romain dans ses agissements, ses choix, ses questionnement. C'est un jeune homme sensible, courageux
et en manque d'affection, en mal être dans la société étriquée qui l'étouffe.
 
"- Je comprends pas qu'tu parles de chez toi comme l'enfer, continue le garçon à la peau d'ébène. T'as tout c'que nous on rêverait d'avoir. T'as un lit, des p'tits pains, des gens qui s'occupent de toi. T'as rien à voler pour le lendemain. Tu dors au chaud quand y caille ou quand le ciel y nous pisse dessus.
Romain se tourne et plonge ses yeux dans les siens.
- Tu as raison, Akou. Mais il me manque une chose. Une seule qui gâche toutes les autres, que vous avez et que moi je n'ai pas.
- Et c'est quoi, ce fameux trésor?
- La liberté."


Son amitié avec Ambroise, le fils du préfet est solide. Ce dernier est un garçon  déterminé, frondeur aussi. 

" Tu es mon ami parce qu’avec toi, il n’y a pas de limite à ce qu’on peut vivre, à ce qu’on peut essayer d’être. Je comprends aujourd’hui pourquoi. Mais ça n’enlève rien. Au contraire. Ça t’ajoute le courage. Alors, pour tout ça, tu es et tu resteras mon ami. Quoi que tu sois."

Lion est un jeune homme de l'île, défiguré mais énergique et d'humeur joviale.
Akou, un noir est le frère de coeur de Lion, un brin froussard, en colère, il soulèverait des montagnes.

Joséphine est un personnage féminin au caractère et aux rondeurs assumés. Elle est une amoureuse de la vitesse et des jolis garçons.
Une galerie riche et diversifiée compose  la Cour des Miracles : du vieux revanchard à la vieille folle, en passant par les gros bras et les chétifs Guenillards, du curé médecin au chasseur énigmatique et dangereux.

La famille de Romain
Adélaïde, la sœur de Romain est un artiste de talent mais non reconnue par ses parents. Elle est assez proche de son frère. 

Isabelle de Sens, aristocrate déchue est une femme en recherche constante de considération et souvent amère. 

Rodéric de Sens, chef de la police de la Norme se réfugie dans son travail et délaisse ses enfants alors qu'il présente une sensibilité à l'art, notamment la poésie.

Les Lames Noires vs Les 30 Opposants
 Dans ce récit deux sociétés secrètes s'affrontent dans les Nuits parisiennes et n'hésitent pas à faire couler le sang. Les Lames Noires servent l’Archevêque dans sa soif "d'épuration". Mais il existe une faction d'érudits et de bourgeois rebelles qui luttent dans l'ombre pour saper le pouvoir grandissant de l'Eglise extrémiste. 

La Police de la Norme applique la loi comme son nom l'indique mais sans zêle particulier. 

La plume de l'auteur

J'ai apprécié la construction du récit avec des chapitres courts qui créent un bon rythme et les illustrations et textes qui donnent de l'épaisseur à l'intrigue. L'auteur nous laisse nous installer tranquillement dans l'ambiance et le contexte historique et puis au fur et à mesure de l'avancée dans le récit la tension monte, les péripéties sont plus nombreuses et périlleuses. Une plume alerte et sensible fort agréable et fluide.

En bref

 Un récit faisant la part belle à la différence et à la farouche envie de la défendre. Une intrigue avec complots, actions, coups bas et moments de grâce et enfin une plume à découvrir à la fois douce et précise, addictive et réflexive. Rejoignez la Cour des miracles révélatrice des hommes et de leurs intentions en cette année 1858 régie par la Norme, pour rallier les Guenillards et les anormaux.






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