Crédits : Scrineo |
Floriane Soulas
Scrinéo
mai 2019
586 p.
#ISBN9782367407043
Le texte d'éditeur
1461, Japon.
Hikari, une mystérieuse jeune femme, vit avec ses sœurs dans une forêt peuplée de petits Dieux de la province d'Izumi. Fascinée depuis toujours par les humains, elle s'intéresse de près aux villageois installés au pied de la montagne, et plus particulièrement à Jun, l'un des bûcherons. Mais le contact avec les hommes est formellement interdit par son clan...
2016, Tokyo.
Depuis toujours, Mina a le pouvoir de voir et de côtoyer les yokaï, esprits et monstres du folklore japonais. Solitaire à cause de ce don qu'elle doit cacher à tous, la jeune fille ne se sent pas à sa place dans la société.
Jusqu'au jour où un esprit tente de s'introduire dans ses rêves et que Natsume, une fille de sa classe, l'entraîne dans une chasse au démon à travers la capitale...
Deux univers qui se croisent, deux destins qui s'entremêlent, entre quête d'identité et désir d'émancipation.
Le contexte de lecture
Lu dans le cadre d'un challenge le Tournoi des élites et l'épreuve des stratèges pour la team guérisseurs du PLIB. J'avais déjà découvert l'année dernière Rouille de Floriane Soulas dont j'avais apprécié la plume et le sens du rythme.
Crédits : PLIB |
La petite histoire
Deux histoires s'alternent une dans le Japon médiéval merveilleux avec magie et esprits Yokaï notamment l'envoûtante Hikari , l'autre avec une adolescente Mina dans un Japon contemporain à l'ambiance fantastique souvent oppressante. Deux époques et pourtant un fil conducteur, un lien rouge sang.
Ce que je retiens de cette lecture...
La couverture
La couverture du livre, d'abord, elle est signée Aurélien Police dont le travail est toujours aussi soigné et empreint d'émotion, de poésie, de mélancolie. Une très belle interprétation de cette histoire.
" Un craquement retentit dans le ciel moucheté d'étoiles. Mina leva la tête, juste à temps pour voir la lune se fendre en deux comme une mâchoire toute en dents déchiquetées."
L'univers proposé
Alternance de deux périodes : le Japon contemporain avec Mina et ses visions de fantômes et êtres surnaturels et un Japon médiéval empreint de légendes et de sacré où les petits dieux enchantent et/ou enchaînent de leurs sortilèges les hommes qui les aperçoivent.
J'aime ce chassé-croisé entre passé et présent pour petit à petit reconstruire deux histoires qui s'appellent, se font écho.
Le Japon médiéval magnifie les saisons et la nature, l'instinct et le sacré. J'ai beaucoup aimé l'atmosphère feutrée et magique de ce temps suspendu à la frontière du réel.
Le Japon contemporain, par contraste, est très peuplé, foisonnant, toujours saturé de bruits, de personnes, d'odeurs et de couleurs ; il est en accord avec le ressenti confus de Mina, toujours happée par les appels des fantômes. La nature y est quasi absente.
Les personnages
Hikari est une kitsune, un yokaï renard, c'est-à-dire un esprit métamorphe sorte de petit dieu vivant dans la nature et dans des lieux sacrés vénérés et craints par les hommes. Nous suivons cette chasseresse qui vit en clan. Ce clan est exclusivement composé de femmes aux pouvoirs enchanteurs. Ces esprits vivent dans les forêts reculées loin des hommes. Hikari n'est pas sujette aux affres du temps pourtant elle s'émerveille de petits moments offerts par la beauté de la nature et elle se pique de découvrir les humains qui l'intriguent et la fascinent. Elle fait montre d'une curiosité avide de connaître l'humanité.Une distance doit être gardée entre hommes et dieux que Hikari va franchir au grand dam de son clan et pour le malheur d'un village. Elle est attirée par Jun, un jeune bûcheron, un rien intrépide. Mais Hikari est jalousée par plusieurs femmes du clan notamment Ino, la cheffe et Morio. De ces envies vont naître une rivalité qui va bouleverser le destin d'Hikari.
Indépendante, Hikari n'en ai pas moins sensible.
Par ce dernier trait, elle se rapproche de sa sœur Akane qui est douceur et compréhension, sagesse et intelligence. Akane respecte le besoin de liberté de sa sœur a contrario du reste du clan qui réagit en meute, très possessif.
L'instinct animal prédateur n'est jamais bien loin, gare aux hommes imprudents qui s'approchent de trop près !
Nous découvrons également Mina, une lycéenne, sujette à des visions quasi permanentes de fantômes et entités surnaturelles. C'est une jeune fille qui nous apparaît d'abord comme apeurée, acculée et ployant sous le poids d'un pouvoir qui est pour elle une malédiction. Elle subit des cauchemars récurrents et énigmatiques qui la laisse épuisée. Ce personnage va beaucoup évoluer au fil de ses découvertes et des révélations qui vont être levées sur son père et la nature de ses dons. Elle va pouvoir avancer grâce à sa rencontre avec une apprentie chasseuse d'esprit Natsume. Toutes deux vont se lancer à la poursuite d'un tueur en série qui s'attaque essentiellement à des Yokaïs dans un Tokyo nocturne et inquiétant.
On avance à tâtons dans cette histoire, les tenants et aboutissants sont dévoilés par bribes, lentement et l'on s'attache progressivement à chaque personnage.
Patte de l'autrice
J'aime beaucoup le rythme de ce double récit qui prend son temps et pourtant ne ménage pas nos émotions et sait être tendu par moment voire haletant. Une atmosphère d'insécurité, de menace, de tension plane constamment sur les personnages. Le lecteur n'est jamais serein.
"Le chant des oiseaux dans les arbres redoubla d’intensité et une pluie fine et miroitante se mit à tomber d’un ciel sans nuages.
- Je n’ai pas pris de parapluie, se lamenta Mina en regardant le ciel d’un bleu limpide qui pleurait pourtant des larmes fraîches.
- Ça ne va pas durer. C’est le kitsune no yomeiri, les noces de la renarde, dit Reika avec un sourire.
- Les noces de la renarde ? Qu’est-ce que c’est ? demanda Mina, intriguée.
- Une vieille légende qui dit que lorsqu’il pleut par beau temps, un kitsune se marie quelque part dans la montagne, répondit Natsume en fronçant les sourcils.
- C’est un présage, il faut prêter attention à ce qui nous entoure, renchérit la nourrice."
Je me suis laissée enchanter par ce récit exotique. Le sortilège d'envoûtement m'a transportée d'un mot à une page, d'un chapitre à l'autre, avec délice et effroi. J'ai vibré avec les personnages, sursauté souvent, serré les dents aussi. Comme pour Rouille, ce sont les sensations qui restent prégnantes encore, plusieurs jours après la lecture, des réminiscences d'un ressenti particulier et marquant pour un bon moment.
Une belle découverte : dans un Japon alternant entre époque contemporaine et Japon médiéval avec comme trait d'union la magie des Yokaïs.
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